Des cohabitations génératrices de tensions pour le chien ...
Avec quelles conséquences pour lui ?
Sujet:
Des cohabitations génératrices de tensions pour le
chien ... Avec quelles conséquences pour lui ?
Chez le chien, comme pour nous « ...une émotion non gouvernée finit toujours
par provoquer un trouble métabolique (accélération des rythmes cardiaque et
respiratoire, crispation des muscles, etc.…) Et pour peu que cette émotion
soit durable, lorsque par exemple le maître d’un chien l’entretient par des
scénarios répétitifs, ces troubles métaboliques finissent par provoquer des
comportements altérés et des maladies organiques chez l’animal.»
Ces propos de Boris Cyrulnik* dans plusieurs de ses ouvrages**, appellent à
nous questionner sur une meilleure gestion de l’émotionnel de nos chiens
dans notre quotidien à leurs côtés.
Alors que leurs propriétaires sont authentiquement convaincus d’offrir le
mieux à leur animal, beaucoup de chiens peinent pourtant à s’adapter à leurs
conditions de vie relationnelle.
Supposé que le chiot ait pu naître et débuter son développement dans les
meilleures conditions d’élevage, et donc bénéficier d’un bon équilibre
émotionnel de chiot confiant, explorateur et prêt à vivre avec l’homme, que
va –t-il trouver chez ceux qui l’accueillent ? Sauront –t-il garantir son
bien-être ?
La notion de bien-être
La complexité du statut de « chien membre de la famille » rend la question
vaste et la réponse difficile. Le bien-être de tout animal n’est-il pas la
prise en compte et le respect de son éthologie et sa physiologie, pour se
rapprocher le + possible des besoins de son espèce ?
La notion d’Umwelt , en français : de « monde propre à une espèce » ouvre à
considérer par exemple, qu’avec son équipement sensoriel spécifique, notre
chien vit dans un monde d’odeurs et de sons auxquels nous avons peu accès
(voire pas du tout). Qu’il a d’autre part des comportements sociaux (pour
interagir et éventuellement vivre en groupe avec ses congénères) qui sont
plutôt éloignés des nôtres. Rien qu’avec ces quelques éléments de
différenciations, on note que le chien n’est pas une copie d’être humain,
duquel on peut attendre ce que justement seul un humain peut développer.
Dans tout notre quotidien avec le chien, nous devons donc tenir compte de
ces éléments, pour trouver à harmoniser une cohabitation qui ne lui soit pas
pathogène et génératrice de ces troubles émotionnels, métaboliques,
comportementaux et autres maladies organiques pouvant en découler.
Exemple de répression ordinaire (génératrice de tensions)
Nos compagnons à 4 pattes détectent très bien nos états émotionnels qui
transparaissent dans certains de nos comportements ou/et odeurs qui sont
pour eux autant d’indices accessibles (sécrétions cutanées variées et zones
corporelles diverses, livrant au chien des messages à valeur et portée
différentes).
C’est ainsi par exemple, que nos paumes de mains ou notre zone génito-anale,
les renseignent sur toute notre identité, nos peurs ou au contraire notre
confiance.
Le comportement de flairage est donc indispensable à l’équilibre d’un chien
pour s’ajuster devant toute situation de vie commune ou de rencontre.
Pourtant, le flairage (comme bien d’autres comportements naturels du chien)
est fort mal apprécié des humains qui cherchent à l’étouffer. Voir son
animal inspecter l’entre-jambes d’un visiteur ou d’une dame rencontrée en
balade, est un comportement d’approche suffisamment loin de nos codes
sociaux pour être assez mal vu par tout le monde !
La répression de ce comportement est parfois étendue au flairage des propres
congénères de l’animal (dont c’est pourtant le seul moyen pour s’ajuster
émotionnellement et donc comportementalement) ou aux déjections des dits
congénères (en référence à notre propre répugnance pour tout dépôt
éliminatoire malodorant, solide ou liquide !)
Combien d’émotions, de frustrations, d’agitations, d’aboiements soulevés
chez nos chiens par cette répression ordinaire, qui répétitive et ajoutée à
tant d’autres mesures répressives toutes aussi « invisibles », leur fabrique
une vie de tous les jours pas si facile. Un quotidien ordinaire et
relationnel générateur de quelques-uns de ces troubles métaboliques et
comportementaux qui pourraient être évités, s’il l’on s’informait mieux des
besoins éthologiques de l’animal.
Exemple d’un quotidien bouleversé (générateur de tensions)
L’histoire assez banale de Nova (la Golden de Luc et Adeline) qui a vu
arriver leur bébé il y a 2 ans, est pourtant significative de ce qu’un chien
peut être bousculé et même débordé émotionnellement et biologiquement dans
son relationnel.
Arrivée en fin de grossesse, Adeline qui travaille prend son congé
maternité. Vient la naissance de bébé et encore un peu plus tard voilà la
reprise du travail pour la jeune femme. Quelques mois passent et c’est le
temps des vacances pour Adeline, Luc et bébé qui s’offrent 3 semaines de
détente à la montagne. Mais cela sans Nova, qui contre l’habitude restera
cette fois chez les grands parents.
Tous ces changements de rythme de vie successifs avant, pendant et après
l’arrivée de bébé, bouleversent Nova sans que son malaise soit repéré.
Elle maigrit progressivement, son poil terni, tombe trop, elle s’isole, elle
mange mal (plus mal qu’avant). Elle ne dort plus dans la chambre de ses
propriétaires qu’elle déserte d’elle-même, joue de moins en moins et même
plus du tout.
Nova urine dans la maison (ça n’était pas du tout son habitude) et Adeline
et Luc finissent par repérer qu’elle boit plus qu’avant. Le vétérinaire
consulté diagnostique un diabète et donne un traitement par insuline qui n’a
jamais pu être équilibré (Nova faisait des accidents d’hypo glycémie)
Un autre vétérinaire consulté, diagnostique un diabète hormonal et préconise
de stériliser Nova et de lui donner une nourriture ménagère : les conseils
sont suivis. Nova vient à boire normalement mais elle continue d’uriner dans
la maison, de jour et de nuit.
Adeline et Luc désemparés, font alors appel à moi
Quand je les rencontre, Nova pèse 24 kg, se traîne l’œil morne et j’ai du
mal à reconnaître une Golden. Elle ne m’accueille pas, me jette à peine un
regard. Elle serait devenue indépendante me dit-on !
Tout au long de l’entretient, Nova colle aux basques d'Adeline qu’elle
sollicite constamment, recevant d’elle toutes les caresses et regards
demandés (Nova était-elle aussi indépendante que ses propriétaires la
percevaient ?)
On me la décrit comme très soumise, mais n’écoutant pas quand on veut la
faire venir à soi ! (Comportements de Nova et interprétation des humains
étant parfaitement contradictoires)
La gamelle stagne dans l’entrée dédaignée par Nova, qui ne mange que si on
est présent. Vomissements et diarrhées lui arrivent périodiquement. Elle
boude les balades, il faut prier et tirer Nova pour la sortir de "sa
paresse" me dit-on !
Visiblement pour moi, Nova n’avait pas si bien que ça « encaissé » tous les
changements de rythme de vie avec la venue de bébé (avec lequel elle est
douce et respectueuse et même un rien distante).
Adeline et Luc médusés (quand je leur ai proposé mon interprétation des
faits) n’avaient aucunement raccordé l’apathie et les problèmes de santé de
Nova, avec les changements de vie de la famille. (Les séparations -simples
départs d’enfants ou divorces- ou au contraire les alliances nouvelles, les
naissances, deuils, déménagements, bref tout ce qui vient modifier le
quotidien et le système relationnel de l’animal, étant susceptible de le
bouleverser émotionnellement, et cela plus ou moins fort et durablement)
Pour Nova, sur 2 années, la succession de pertes de ses anciens repères de
vie a soulevé des émotions multiples et durables, qui ont fini par déborder
toutes ses fonctions adaptatives, biologiques et comportementales.
Alors, puisque ses émotions modifient les comportements du chien et
chahutent sa biologie jusqu’à la déborder ... comment tempérer le registre
émotionnel de l’animal ?
J’ai mesuré en de multiples circonstances, que la réorganisation des
relations d’une famille avec son chien, libérait celui-ci de multiples
tensions pour soulager ce registre émotionnel, qui lui-même apaisé venait
modifier sa biologie en la re-stabilisant… cela :
• En proposant de comprendre d’une part ce qui peut gêner l’animal tout au
long de son quotidien
• En traquant les idées reçues, l’anthropomorphisme qui barre la route de la
réalité animale
• En proposant une structuration des rapports humains/chien au quotidien,
avec la mise en place d’une circulation claire des échanges (à l’initiative
des propriétaires) et cela accompagnant quelques règles précises
d’organisation de cette cohabitation (pour la distribution de la nourriture
– les échanges avec le bébé – les jeux – l’occupation de l’espace et les
déplacements y compris les balades…) pour faire cohérence.
C'est ce pouvoir réorganisateur d’une meilleure communication dans une
relation plus respectueuse des besoins éthologiques du chien, qui a pu
libérer Nova des tensions émotionnelles quotidiennes qui chahutaient sa
biologie.
Sur quelques semaines, elle a petit à petit régulé tous ses comportements
(alimentaire, d’élimination, de jeu, de balade, de veille et sommeil) elle a
repris du « poil de la bête » ... et puis plus signe de diabète !
Le plus souvent, il n’est donc pas repéré que des chiens peuvent vivre
d’importantes tensions (stress) - et cela durablement - dans leur quotidien
près des humains. En conséquence, rien n'est entrepris pour les en soulager,
et donc leurs situations de santé peuvent lentement s’altérer sans qu’il
soit fait de lien entre les causes (cohabitation génératrice de ces
tensions) et les effets (comportements modifiés, désordres métaboliques,
jusqu'à des pathologies diverses quand les tensions à vivre sont chroniques)
…
La tâche des Caniconsultant(e) est justement d'aider à ces ajustements
cohabitationnels pour des soulagements de tous les acteurs en présence
(humains et chiens).
*Éthologue et neuropsychiatre
**"Mémoire de singe et parole d’Homme" et "Sous le signe du lien"
Danièle Mirat – Caniconsultante
Site Internet : http://www.communicanis.com
Formations de professionnels : Caniconsultant – Féliconsultant –
Canimédiateur/Canimédiatrice
Site Internet : http://www.operrha.com
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